Avant d’aborder plus spécifiquement le sujet qui nous intéresse, nous allons passer en revue quelques classifications des systèmes de la perception humaine.
Il est d’usage de parler des cinq sens : la vue, l’ouïe, l’odorat, le goût et le toucher. Cette classification constitue une première approche de la perception du monde qui nous entoure; comme nous allons le voir, la perception est bien plus complexe.
Pour commencer, j’ai choisi de citer le résultat d’une étude en psychologie (Hatwell, 1994) qui a abordé le problème de la perception des informations. Selon cette étude, ces dernières sont perçues par un sujet voyant à:
Pour autant, il faut rester prudent avec une telle approche. En effet, la perception peut être segmentée en cinq sens. Pourtant, le tableau 1.1 présente une classification des sensations. Il s’agit de la classification de Sherrington (1857-1952).
les extérocepteurs : nous renseignent sur le monde extérieur | télérécepteurs : perception à distance | récepteurs visuels |
récepteurs auditifs | ||
récepteurs olfactifs | ||
récepteurs de contact | récepteurs gustatifs | |
récepteurs cutanés du toucher | ||
les intérocepteurs : nous renseignent sur notre propre organisme | viscérocepteurs : disséminés dans les viscères | nous renseignent sur un paramètre physiologique interne (la douleur par exemple) |
propriocepteurs : regroupés (oreille interne) ou disséminés (fuseaux neuro-musculaires) | nous renseignent sur un paramètre lié au travail de relation : l’état de tension des muscles, sur la position relative des différentes parties du corps, et sur la position du corps dans l’espace |
Table 1.1 : Classification des sensations de Sherrington (Calas, 1998)
Étudions plus précisément tout ce vocabulaire...
Pour (Berthoz, 1997), « la perception n’est pas seulement une interprétation des messages sensoriels. Elle est également contrainte par l’action, simulation interne de l’action, jugement et prise de décision et anticipation des conséquences de l’action : il y a filtrage des informations données par les sens en fonction de ses projets propres. Un très grand nombre de mouvements exigent une anticipation ou une extrapolation fondée sur une estimation utilisant les expériences antérieures (rôle de la mémoire). »
Tout ceci nous donne une vision peu évidente de la perception. Et il n’est pas question ici d’aborder le côté philosophique de la question.
« Percevoir, c’est se rendre quelque chose de présent à l’aide du corps »
Merleau-Ponty
Pour finir cette partie d’introduction, précisons que toutes les connaissances qui se rapportent au corps, évoluent en fonction des avancées de la compréhension des mécanismes mis en œuvre.
Nous allons tenter, dans ce qui suit, de définir la terminologie utilisée lorsqu’il est question d’interaction haptique.
Our knowledge of touch consists of only fragmentary concepts and findings, some dealing with basic functional properties (e.g., cutaneous sensitivity, limits of kinaesthetic space perception) and others with capabilities of the systems as a whole (e.g., the identification of three-dimensional objects)
(Loomis et Lederman, 1986), cité par (Colwell, 2001)
Tout d’abord, un petit peu d’étymologie. Le mot haptique vient du grec haptestai signifiant « toucher », et est originalement synonyme au sens tactile.
D’après (Appelle, 1991), ce serait le psychologue (Revesz, 1950) qui aurait le premier utilisé le terme haptique pour désigner le système tactilo-kinesthésique de la main, c’est à dire la synthèse
Plus tard, pour (Loomis et Lederman, 1986), la perception haptique était celle qui impliquait les sens cutanés et kinesthésiques pour transmettre l’information sur un objet ou sur un évènement. Ils n’ont cependant pas restreint cette définition à la main. La sensation de la texture de la nourriture dans la bouche apparaît donc comme une partie de la perception haptique, au sens de Loomis et Lerdeman.
Une autre définition est celle de (Gibson, 1966) (toujours cité par (Appelle, 1991)). Pour lui, la pression, la force, la stimulation de la peau, l’activité des muscles, des articulations et des tendons étaient mises en œuvre lors de la manipulation d’objets. Pour Gibson, le système haptique inclue plusieurs sous-systèmes :
(Appelle, 1991) a très justement noté que la prolifération des termes et des définitions liés à la perception haptique, indique que la compréhension dans ce domaine n’en est toujours qu’à ces débuts. Il est également fréquent de trouver des définitions contradictoires entre plusieurs recueils.
Dans ce chapitre et dans la suite de cette thèse, nous retiendrons la définition actuellement admise, à savoir :
le terme haptique se réfère à la combinaison :